L'EXAMEN DU COL UTERIN
Retour à la table des matières
Lorsqu'on fait un examen gynécologique, et certains
d'entre vous en font, on peut, "regarder" le col, ou faire une colposcopie.
Entre ces deux extrêmes, il y a la place pour un "examen" du col, une
sorte de screening, destiné à filtrer, et à adresser
au colposcopiste les cas douteux ou pathologiques. C'est le propos de ce
petit topo.
Vous devez certainement être familiarisés avec des mots tels
que "col", "exocol", "endocol", épithélium cylindrique, glandulaire
et épithélium malpighien, stratifié. Peut être
un peu moins avec les notions de zone de transformation et de jonction
squamo-cylindrique.
La jonction, c'est la ligne, la frontière entre, en dedans
l'épithélium cylindrique, glandulaire, avec un aspect papillaire,
grappe de raisin, raisin jeune, et en dehors le revêtement de l'exocol.
Pour comprendre et visualiser la zone de transformation, il faut savoir qu'avant
la puberté, l'épithélium cylindrique recouvre une partie
du col, sa limite externe est en dehors de l'orifice anatomique du col, bien
en dehors. Une grande partie de cet épithélium va subir une
transformation, centripète, pour ressembler à
l'épithélium malpighien, pluri-stratifié qui l'entoure.
Le jour où vous examinez ce col, la transformation a progressé
pour aboutir à la jonction que vous trouvez aujourd'hui. La zone de
transformation, c'est la zone comprise entre l'ancienne frontière
et la frontière actuelle, qui n'est autre que la jonction, comprise
donc entre le cercle dessiné précédemment et celui qui
se dessine aujourd'hui.
Examiner un col, c'est s'intéresser à cette zone de transformation.
C'est de cette zone que naîtront les anomalies cytologiques. Faire
une colposcopie, c'est utiliser un colposcope pour préciser ce que
l'on a trouvé à l'examen et diriger les biopsies qui doivent
se rapprocher le plus possible de la jonction, parce que c'est à son
niveau que les anomalies cytologiques sont le plus prononcées.
L'examen du col comporte trois temps.
Auparavant, pour exposer le col, on pose un spéculum, on essaie de
ne pas léser le col en le posant.
Un petit truc pour la pose: diriger toujours le spéculum nettement
en arrière, vers le coccyx et ouvrir après, quand il est au
fond. Dans 80% des cas, vous aurez le col.
Le col est exposé, 3 temps donc: Le premier, examen sans
préparation. Le deuxième, on arrose ou on tamponne le col avec
une solution à 3 ou 5% d'acide acétique. Le troisième,
on fait de même avec du lugol fort, une solution iodée.
Examen sans préparation:
Un col normal est rose, homogène. Je vous rappelle que lorsque l'on
observe un col, on voit un stroma à travers un épithélium.
L'aspect retrouvé résulte donc du stroma et de
l'épithélium qui le recouvre.
Quand le col n'est pas uniformément rose, on peut y voir des zones
rouges ou des zones blanches.
La zone rouge .
Elle est le résultat soit d'une augmentation de la vascularisation
du stroma, soit de la diminution de l'épaisseur de
l'épithélium. Si le stroma est plus rouge, le col sera plus
rouge. De même si le stroma normal est recouvert par une pellicule
plus fine.
- Augmentation de la vascularisation du stroma, deux causes : inflammation
ou dysplasie.
- Diminution de l'épaisseur de l'épithélium, deux causes
: l'épithélium cylindrique ou l'atrophie de
l'épithélium malpighien. Voilà pour les zones rouges.
La zone blanche. Elle résulte de deux situations, la diminution de
la vascularisation ou l'augmentation de l'épaisseur de
l'épithélium.
- Diminution de la vascularisation du stroma dans l'atrophie post
ménopausique par exemple.
- Augmentation de l'épaisseur de l'épithélium dans les
leucoplasies, une sorte de kératinisation de ce revêtement.
Le deuxième temps, l'exposition à la solution d'acide acétique.
Quel est l'effet de l'acide acétique? Cette solution révèle
l'activité nucléaire de l'épithélium.
L'apparence de l'épithélium malpighien normal n'est pas
modifiée. Quant à l'épithélium cylindrique, il
devient rose, luisant, aspect dit papillaire, grappes de raisin blanc jeune.
Les zones qui vont blanchir sont dites acidophiles. Elles sont donc le
siège d'une activité nucléaire de surface. Vont donc
être acidophiles, les cancers, les dysplasies et aussi les
métaplasies immatures et les métaplasies matures qui ne sont
pas strictement un tissu normal, on les appelle dystrophie.
Je vous rappelle que la métaplasie, c'est le passage d'un tissu
cylindrique à un tissu malpighien.
Au sein de ces zones blanches, on peut distinguer des ponctuations ou des
aspects dits de mosaïques qui correspondent à la visualisation
des vaisseaux du stroma à travers l'épithélium. Dans
la mosaïque, les vaisseaux courent parallèlement à
l'épithélium et dessinent en se croisant des mosaïques.
Les ponctuations résultent, elles, de l'aspect des vaisseaux
perpendiculaires à l'épithélium.
Le troisième temps de l'examen du col: le test de Schiller.
C'est l'exposition du col au lugol fort, une solution iodée. Elle
révèle la présence de glycogène dans le cytoplasme
des cellules de l'épithélium.
Notez que l'acide acétique renseigne sur l'activité nucléaire
et le lugol sur l'activité cytoplasmique.
Une cellule contient du glycogène quand elle est mature. Le col normal,
l'épithélium malpighien normal est iodo-positif, il se colore
en brun.
Dans quels cas un tissu sera-t-il iodo-négatif ?
Un tissu normal iodo-négatif, c'est l'épithélium
cylindrique. Sur le versant malpighien, le cancer est iodo-négatif,
les cellules ne sont pas matures. La dysplasie elle aussi. Les métaplasies
immatures et la métaplasie mature qui n'est pas parvenue au stade
de tissu malpighien normal non plus ne prend pas le lugol. On peut aussi
avoir des zones iodo hétérogènes. Ce sont souvent des
zones inflammatoires, éventuellement virales, HPV principalement.
Les aspects les plus fréquemment rencontrés sont les ponctuations
blanches et les carrelages inversés, c'est pas le noir qui dessine
le carrelage mais le blanc.
En résumé.
L'examen du col, c'est plus particulièrement l'examen de la zone de
transformation.
Grâce à trois temps qui chacun vont apporter des renseignements
différents et complémentaires.
L'examen sans préparation, avec les zones rouges et les zones blanches,
l'acide acétique qui renseigne sur l'activité nucléaire
et le lugol qui donne des notions sur l'activité cytoplasmique.
Armés de ces connaissances, vous saurez rassurer la patiente, faire
un frottis ou adresser pour une colposcopie. Retenez une chose : une zone
rouge à l'examen sans préparation, qui blanchit à l'acide
acétique et ne prend pas le lugol est fortement suspecte. Ne la laissez
pas aller sans l'explorer.
Cette mise au point a été difficile à écrire. Ça n'a pas été le fait de la complexité du sujet, non. La difficulté consistait à se libérer de l'influence d'un excellent article de Renzo Barrassso et Dominique Weil-Masson paru dans Reproduction humaine et hormones de novembre-décembre 1991.